La loi relative aux sociétés publiques locales est parue au Journal Officiel le 29 mai 2010. Que revêt exactement le terme de " sociétés publiques locales " ? Et quelles sont les conséquences que l'on peut attendre du développement de ces sociétés ?
Cette loi vise essentiellement à permettre aux collectivités locales et à leurs groupements de confier à ces SPL des missions sans mise en concurrence. On entrevoit déjà qu'elles pourront être les conséquences. C'est pourquoi une circulaire précisant la loi, est en cours d'élaboration par le Ministère de l'Intérieur.
1 - La société publique locale
a) Définition de la société publique locale
Pour que la collectivité envisage la création d'une SPL il est nécessaire de respecter deux conditions :
- la personne publique doit exercer sur la société un contrôle analogue à celui qu'elle exerce sur ces propres services (capitaux 100 % public, contrôle préalable des missions confiées à la société)
- l'entreprise réalise l'essentiel de son activité avec la ou les collectivités qui la détiennent : ce qui se traduit par le fait que les SPL exercent leurs activités exclusivement pour le compte de leurs actionnaires et sur le territoire des collectivités territoriales et des groupements de collectivités territoriales qui en sont membres
La société publique locale prend donc la forme d'une société anonyme à capitaux 100 %, détenu par au moins deux collectivités (ou leurs groupements).
b) Champ d'intervention de la société publique locale
Les sociétés publiques locales bénéficient d'un large champ d'intervention. Et c'est précisément ce champ d'intervention, qui n'a pas de limite clair, qui fait craindre des recours abusifs à ces sociétés.
- Opérations d'aménagement et de construction
- Exploitation de service public à caractère industriel et commercial (ex : distribution d'eau potable, transport de voyageurs)
-
autres activités d'intérêt général
2 - Le régime dit " in house "
Les sociétés publiques locales font partie de ce qu'on appelle le " régime in house ". Dispositif compliqué, il nécessite une petite mise au point, pour comprendre le fonctionnement de ces sociétés.
Les " prestations intégrées " ou " contrats in house ", découlent directement de la jurisprudence européenne. C'est la jurisprudence " STATD Halle " (CJCE 11 Janvier 2005). En France c'est l'article 3.1° du Code des Marchés Publics qui régit ce type de contrat.
Les critères du " in house " sont ceux énoncés pour la création d'une société publique locale :
- la collectivité doit exercer sur cette société un contrôle analogue à celui qu'elle exerce sur ses propres services :
- les missions qu'elle est susceptible de lui confier ne sont pas traitées autrement que si elles avaient été simplement déléguées au sein de la personne publique
- la société publique locale n'a aucun pouvoir de décision, elle ne dispose d'aucune autonomie, c'est pourquoi la mise en concurrence préalable n'est pas considérée comme nécessaire
- la jurisprudence communautaire, lorsqu'il s'agit de déterminer si la personne publique exerce effectivement un contrôle analogue a tendance à l'interprétation restrictive : ainsi les prestations réalisés par un groupement de communes ne sont pas des " prestations in house ", ou encore les prestations réalisées par une société d'économie mixte (la personne publique peut détenir une part de la société, mais dès lors qu'il existe une participation privée, même minime, la prestation intégrée ne peut exister) ;
- la collectivité doit être le principe destinataire de l'activité de la société :
- Rappelons ici, qu'il ne s'agit pas simplement d'une forte dépendance qui ne suffit pas à caractériser le caractère de " prestation in house "
- Le lien s'accompagne généralement d'une quasi exclusivité de la fourniture des prestations au profit de la personne publique
- La jurisprudence communautaire ne fixe pas de seuil à partir duquel on peut estimer que la collectivité dispose d'une quasi exclusivité, il s'agit donc ici d'apprécier au cas par cas
Notons que les sociétés publiques locales doivent, elles, respecter scrupuleusement les règles de passation des marchés publics, pour leurs achats.
Pour être qualifié de contrat " in house ", les deux conditions citées ci-dessus doivent être remplies, et perdurer pendant toute la durée du contrat.
3 - Les conséquences de l'introduction des sociétés publiques locales en droit français
Les sociétés publiques locales ont été créées pour renforcer la capacité d'action des collectivités. Le cas de ces sociétés, bien que le Gouvernement soit resté discret, a néanmoins fait couler beaucoup d'encre. On note, particulièrement l'inquiétude autour de l'interprétation de la notion " d'intérêt général ". En effet, celle-ci peut-être interprété de manière très large, laissant quasiment tous les services municipaux sous la houlette des sociétés publiques locales.
Par ailleurs, il faut noter que les comptes de ces sociétés publiques locales, ne seront pas intégrés aux comptes de collectivités actionnaires. Le contrôle des dépenses n'en sera que plus difficile jetant ainsi un voile sur l'endettement parfois considérable de certaines collectivités.
Enfin si les services municipaux peuvent être du ressort de ces sociétés, il semble inévitable que la population devra payer le coût de ces services.
Pourtant on peut penser que ces sociétés publiques locales auront un effet positif. Certaines collectivités sont surchargées de travail, le recours à ces sociétés peut être considéré comme un outil pour permettre un service public plus efficace, et tourné vers l'essentiel. Toutefois notons, que les collectivités pourront nommer à la tête de ces sociétés leurs amis politiciens, ou nommer un gestionnaire en fonction de sa couleur politique. Il serait donc de bon ton, de réfléchir à un décret d'application de la loi, instaurant les règles et les limites claires et précises du recours à ces sociét@??s et de leurs fonctionnement.