Mis à jour: 3 août 2017
Lors de la passation d'un marché, il peut arriver que la procédure se déroule dans de mauvaises conditions, entraînant l'attribution du marché à un candidat qui aura pu bénéficier d'avantages vis-à-vis de ses concurrents. Ainsi est-il possible pour les candidats évincés de faire entendre leurs voix, pour contester l'attribution du marché ? En effet, plusieurs voies de recours leurs sont offerts selon que l'on se trouve avant, pendant ou après la signature du marché.
Les voies contentieuses en matière de marchés publics, ont fortement évolué du fait notamment du juge administratif et de la jurisprudence, mais surtout du fait de l'influence communautaire. C'est la directive du 11 décembre 2007 relative à l'amélioration de l'efficacité des procédures de recours en matière de passation de marchés publics qui a donné le ton. En effet, celle-ci opère une refonte importante du contentieux. Elle a été transposée en droit français par une ordonnance du 7 mai 2009, précisée ensuite par un décret le 27 novembre 2009.
Il existe quatre types de recours :
- le référé précontractuel (modifié par l'ordonnance de 2009) qui intervient avant la signature du marché et permet de contester la procédure de passation du marché,
- le référé contractuel (introduit par l'ordonnance de 2009) qui intervient après la signature du marché et permet de contester la procédure de passation du marché,
- le recours " Tarn et Garonne " : recours en pleine juridiction né de la décision du Conseil d'Etat du 4 mars 2014 " Département de Tarn-et-Garonne ". Il intervient après la signature du marché et permet de contester la validité du contrat ou de certaines de ses clauses. Il remplace le recours " Tropic ".
- Le recours pour excès de pouvoir: ouvert aux tiers au marché et intervient après sa signature.
1- Le référé précontractuel
Le référé précontractuel permet d'obtenir l'annulation du marché ou la régularisation de la procédure lorsque celle-ci n'a pas respecté les obligations de publicité et de mise en concurrence.
Comme son nom l'indique doit être introduit avant la signature du marché par la personne publique. Les personnes pouvant prétendre à déposer un référé précontractuel, sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat, et qui sont susceptibles d'être lésées par des manquements aux obligations de publicité et de mise en concurrence.
Dans la pratique, il peut être délicat d'apprécier l'opportunité d'un recours. C'est pourquoi l'artile 101 du décret du 25 mars 2016 impose à l'entité adjudicatrice le respect d'un délai entre la notification du rejet et la date de signature du marché. Ce délai est de 11 jours, sauf si la notification n'a pas été transmise par voie électronique. Dans ce cas, le délai est porté à 16 jours.
Si un référé précontractuel est introduit, le code de justice administrative prévoit la suspension automatique de la procédure. Il sera alors de la compétence du juge d'apprécier les intérêts en jeu, et le caractère opérant des manquements aux obligations de publicité et de mise en concurrence. C'est à présent au requérant d'apporter la preuve que les agissements de la personne publique est susceptible de lui causer un tort, même de façon indirecte.
Donnons un exemple : une irrégularité formelle dans l'avis de publicité n'ayant aucune incidence sur l'objet du marché ou la sélection des offres n'est pas susceptible d'avoir lésé un candidat, dès lors que celui-ci a déposé son offre.
2- Le référé contractuel
C'est l'ordonnance du 7 mai qui met en place ce nouveau référé contractuel, uniquement ouvert aux candidats évincés. Il doit être introduit dans un délai de 31 jours à compter de la publication d'un avis d'attribution. Dans le cas où aucun avis d'attribution n'est publié, c'est un délai de 6 mois qui commence à compter de la conclusion du contrat, pour introduire le référé contractuel. Ce recours, désormais codifié aux articles L 551-13 à L 551-23 du Code de Justice Administrative, est le pendant, après signature du contrat, du référé précontractuel. Il permet de sanctionner des manquements aux règles de publicité et de mise en concurrence, mise en exergues après la signature du contrat.
Le juge administratif pourra suspendre l'exécution du contrat pendant la durée de l'instance, à moins qu'il n'estime que les inconvénients liés à l'arrêt de la procédure ne soient tellement importants, qu'il vaut mieux dans l'intérêt de tous, maintenir l'exécution du contrat. Il pourra prononcer la nullité du contrat " lorsque l'une des mesures de publicité requises pour sa passation n'a été prise, ou lorsqu'a été omise une publication au Journal Officiel de l'Union Européenne, dans le cas où une telle publication est prescrite ". Il pourra aussi, dans une moindre mesure, réduire la durée du marché, appliquer une pénalité financière si la nullité du contrat n'est pas envisageable pour des raisons impérieuses d'intérêt général.
3- Le recours en pleine juridiction " Tarn-et-Garonne "
Ce recours remplace depuis 2014 le recours " Tropic ", qui existait depuis 2007. Il permet de contester la validité du contrat ou de certaines de ses clauses.
Il est ouvert à tout tiers au contrat, à la seule condition que celui-ci soit "susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses". Cela signifie que toute personne peut engager ce recours, même si elle n'a pas été candidate au marché. Elle peut être susceptible d'être lésée dans ses intérêts si, par exemple, elle n'a pas été admise à présenter son offre alors qu'elle avait un intérêt à le faire.
Le Conseil d'Etat a également étendu le champs des arguments sur lesquels un tiers au contrat peut se baser pour demander l'annulation du contrat. Dans son arrêt du 30 juin 2017, il a confirmé que les tiers peuvent contester le refus de l'acheteur d'accéder à leur demande de mettre fin à l'exécution du contrat.
Le délai de recours est de deux mois après la publication de l'annonce d'attribution. Si l'acheteur n'effectue pas cette publicité, alors il n'y a pas de limite au délai de recours. Les pouvoirs du juge sont assez étends dans le cadre de ce recours, et peut se prononcer sur la continuation du contrat, son annulation ou le versement d'indemnités.