Il peut arriver, en matière de mode de passation, que l'acheteur hésite entre délégation de service public et marché public au vu du mode de rémunération de l’entreprise, évinçant de ce fait de la procédure des candidats ayant de sérieuses chances de l'emporter. Quelles sont en cette circonstance, les possibilités d’indemnité des candidats évincés ? Précisions du Conseil d’État.
L’aléa économique, l’indicateur du régime applicable
Dans le cadre d’un marché de restauration, une société s’était vue classée deuxième au regard de son offre. Estimant son éviction irrégulière, elle parvint à obtenir une résiliation du contrat au motif qu’il avait été conclu selon le mode de passation applicable aux délégations de service public alors que le marché en cause était de fait un marché public de services. Le juge administratif , au regard de l’absence d’aléa économique, avait procédé en requalifiant le contrat en cause en marché public de services. La part de risque transférée au délégataire (recettes perçues sur les usagers, subvention forfaitaire d’exploitation annuelle versée par la commune, complément de prix unitaire au repas servi, facturé selon le nombre de repas comptés lors de chaque service, tout ceci couvrant 86% de la rémunération du cocontractant) rendait en effet quasi-nulle son exposition aux aléas du marché, ce qui impliquait par voie de conséquence que le cocontractant ne puisse être considéré comme supportant un risque lié à l’exploitation du service.
L’établissement d’un lien de causalité entre la faute résultant de l’irrégularité et les préjudices subis, un impérieux préalable à toute prétention indemnitaire
Avant d’avoir quelque prétention indemnitaire que ce soit dans le cadre d’une éviction irrégulière, le candidat requérant doit établir un lien de causalité directe entre la faute née de l’irrégularité et les préjudices subis. Mais c’est au juge administratif qu’il revient de juger si le candidat requérant avait des chances de remporter ou non le contrat litigieux. Lorsqu’au regard des faits et des circonstances, il apparaît que le requérant n’avait aucune chance de remporter le marché, il ne lui est reconnu de droit à aucune indemnisation. Lorsqu’en revanche, un cas contraire survient, le candidat irrégulièrement évincé a droit à un remboursement des frais qu’il a engagés pour la présentation de son offre. Il est en outre recommandé au juge d’apprécier si les chances du candidat irrégulièrement évincé de remporter le contrat étaient sérieuses. Dans la mesure où un tel fait a été établi, le candidat irrégulièrement évincé a droit à une indemnisation couvrant son manque à gagner, indemnisation dans laquelle sont inclus les frais de présentation de l’offre.