Il peut sembler juste pour des personnes publiques de signer des contrats pour lesquels elles ont été informées d’irrégularités qui affectent le choix de l’attributaire lorsque ces irrégularités ne leur sont pas imputables. Néanmoins, malgré l’impression de justesse que peut donner une telle décision, elle est, selon une recommandation du Conseil d’État, à éviter… Une recommandation qui témoigne bien de la délicatesse de la gestion des contentieux dans les marchés publics.
Cas d’espèce : divulgation d’informations dans le cadre du renouvellement d’un marché de concession en cours de procédure
Une entreprise évincée du renouvellement d’une concession relative à une délégation de service, au motif de non-respect de certaines exigences minimales du cahier des charges, a vu divulguées dans la presse certaines informations portant sur la teneur de son offre alors même que le marché était encore à la phase de procédure. L’autorité concédante, informée de cette divulgation qui constituait une irrégularité au regard de l’article L. 3122-3 qui pose l’obligation de respecter la confidentialité des offres, décida néanmoins de poursuivre la procédure jusqu’à terme en raison de sa non-responsabilité dans la divulgation desdites informations. Sa décision fut entérinée par le juge du référé qui déclara la poursuite de la procédure régulière au vu des circonstances. Le Conseil d’État censura cette ordonnance du juge du référé.
Pas de signature de contrat litigieux, que la responsabilité de l’autorité concédante soit engagée ou pas
Le Conseil d’État posa de prime abord le principe selon lequel « la personne publique informée, avant la signature d’un contrat, de l’existence d’une irrégularité de procédure affectant le choix du concessionnaire doit s’abstenir de signer le contrat litigieux, alors même qu’elle ne serait pas responsable de cette irrégularité. » Elle doit plutôt, lorsqu’elle fait le constat d’un tel manquement au principe de confidentialité, juger « si cette divulgation peut être regardée comme de nature à porter atteinte au principe d’égalité entre les candidats. »
Le Conseil d’État estima par ailleurs que l’offre de la société requérante ayant été valablement éliminée, cette irrégularité n’était pas de nature à la léser. Il procéda en conséquence à une substitution de motif selon les termes de sa jurisprudence SMIRGEOMES en prenant soin de préciser qu’il n’y avait pas de deuxième condition qui justifiât que la procédure de passation de la concession fut annulée.