Introduite dans le code de la commande publique en 2016, la possibilité de régulariser les offres irrégulières a marqué un tournant dans le giron de la commande publique. S’il a été plutôt bien accueilli, ce dispositif s’est révélé, dans sa mise en œuvre, un peu moins simpliste qu’il n’y paraissait. La marge de manœuvre des acheteurs en a ainsi subi un coup, devenant plus réduite qu’elle ne se donne à voir en théorie.
Marge de manœuvre de l’acheteur, une marge à définir au cas par cas
La définition des offres irrégulières dans le Code de la commande publique est assez claire ainsi que la liberté pour l’acheteur de les régulariser ou pas. Il faut cependant noter que dans la pratique, les dispositions concernant ces offres sont sujettes, de la part des juges à des interprétations de plus en plus circonstanciées. La liberté des acheteurs dans leur choix de traitement des offres irrégulières ne semble plus si acquise. Dans les faits, une offre, où manquait le bordereau des prix unitaires modifié par exemple n’a pas été considérée comme irrégulière par la Cour d’État dans un arrêt en date du 16 avril 2018 ainsi que le sera une autre qui ne comportait pas un agrément préfectoral dans un jugement rendu le 4 octobre 2019.
Il apparaît, au regard de ces jurisprudences que l’application linéaire des dispositions de la commande publique n’est plus d’emblée la solution la plus évidente. Toutes les offres irrégulières sont à traiter au cas par cas. De ce constat se dégagent 3 catégories d’offres face auxquelles les acheteurs ont des degrés différents de marge de manœuvre.
Les différentes classes d’offres irrégulières
Trois catégories d’offres irrégulières peuvent être mises au jour : les offres à régulariser, celles régularisables et celles non régularisables.
Les premières n’offrent pratiquement à l’acheteur aucune marge de manœuvre ; ce sont pour la plupart des offres dont l’irrégularité est fondée sur une incomplétude du dossier et pour lesquelles l’acheteur dispose, malgré ce manque, de toutes les informations qui lui sont nécessaires pour une analyse complète de l’offre sur la base des critères de sélection.
Pour ce qui est des offres régularisables, la marge de manœuvre de l’acheteur est conditionnée par la fructuosité de la consultation. En effet, en cas d’infructuosité de la consultation, l’acheteur peut choisir de régulariser l’offre d’un candidat dans la mesure où elle lui semble économiquement ou techniquement intéressante. Mais il ne dispose pas d’une totale liberté de mouvement. La décision de régulariser ou non une offre en pareille circonstance doit se fonder sur la nature de l’irrégularité constatée. Ce n’est que face aux irrégularités mineures telles que celles portant sur les modalités de remise des offres ou sur l’incomplétude de l’offre au regard des documents fournis par le candidat que l’acheteur pourra user de sa faculté à régulariser de telles offres.
Les offres non régularisables, elles, sont celles comportant des irrégularités majeures de sorte que leur régularisation porterait atteinte au principe d’égalité de traitement des candidats. Sont à classer à leur rang les offres non conformes au besoin de l’acheteur, celles où manquent les documents financiers ou encore celles dépourvues de documents techniques.