Il est permis, aux termes des dispositions régissant les contrats administratifs, à la personne publique cocontractante, de procéder à une résiliation unilatérale du contrat pour un motif d’intérêt général sous réserve que soient respectés les droits à indemnité de son cocontractant. Un arrêt du Conseil d’Etat en date du 10 juillet 2020 vient faire le point sur les conditions et les conséquences indemnitaires d’une résiliation unilatérale de contrat dont la procédure était entachée d’irrégularité.
La loyauté des relations contractuelles, un principe impérieux à respecter
Dans le cas d’espèce porté devant le Conseil d’Etat, un pouvoir adjudicateur avait résilié unilatéralement un marché au motif que sa procédure de passation avait été entachée d’irrégularité. Le cahier des clauses techniques particulières se portait, dans l’affaire en cause, en faux aux règles de neutralités applicables à la définition du besoin ; les spécifications techniques qui y étaient contenues avaient été en effet rédigées de manière trop restrictive et orientaient vers des produits d’une marque bien spécifiée sans qu’il y figure la mention « ou équivalent ». Se basant sur les principes de la jurisprudence Béziers I, le juge, saisi par le titulaire du marché d’une demande de reprise des relations contractuelles, apporta des précisions sur les droits du titulaire sur le fondement de l’exigence de loyauté contractuelle. La Haute Juridiction jugea que « dans le cas particulier d’un contrat entaché d’une irrégularité d’une gravité telle que, s’il était saisi, le juge du contrat pourrait en prononcer l’annulation ou la résiliation, la personne publique peut, sous réserve de l’exigence de loyauté des relations contractuelles, résilier unilatéralement le contrat sans qu’il soit besoin qu’elle saisisse au préalable le juge. »
Quels droits pour le titulaire en cas d’une irrégularité dont la responsabilité peut être imputée à l’administration ?
Il est permis au titulaire d’un marché résilié unilatéralement par une personne publique pour motif d’irrégularité, de prétendre sur un plan quasi-contractuel, au remboursement des dépenses qu’il estime avoir engagées utilement en faveur de la collectivité dans le cadre dudit marché. Si l’irrégularité dont est entaché le contrat est survenue à la suite d’une faute de l’administration, le titulaire du marché peut, à condition de partager les responsabilités susceptibles au cas échéant de lui être imputées, prétendre à la réparation du dommage résultant d’une faute de l’administration. Il appartiendra dans ce cas au juge, lorsqu’il est saisi d’une demande d’indemnité sur la base d’une faute de l’administration, de vérifier si le préjudice allégué est certain et s’il peut être tissé un lien direct entre le préjudice évoqué et le préjudice.