Aux termes d’un arrêt du 4 décembre 2018, la Cour administrative d’appel de Bordeaux rappelle l’impossibilité pour le maître d’ouvrage de modifier le décompte général et définitif d’un marché public.
Après la réception d’un marché public de travaux, un département, maître d’ouvrage, a notifié au titulaire du marché le décompte général de celui-ci, qui l’a accepté sans réserve. Le solde de ce marché a donc été fixé. Cependant, le département n’a entendu procéder qu’à un règlement partiel du solde du marché, en retranchant à ce dernier le montant de «pénalités diverses» au titre notamment de retards.
Par conséquent, la société titulaire du marché a saisi le Tribunal administratif de Toulouse, qui a condamné le département à lui verser les sommes restant dues au titre du solde du marché en cause.
Saisi en appel par le département, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a tout d’abord rappelé le principe selon lequel « l’ensemble des opérations auxquelles donne lieu l'exécution d'un marché de travaux publics est compris dans un compte dont aucun élément ne peut être isolé et dont seul le solde arrêté lors de l'établissement du décompte général et définitif détermine les droits et obligations définitifs des parties ».
Ensuite, la Cour rappelle qu’ « après la transmission au titulaire du marché du décompte général qu'il a établi et signé, le maître d'ouvrage ne peut réclamer à celui-ci, au titre de leurs relations contractuelles, des sommes dont il n'a pas fait état dans le décompte, nonobstant l'engagement antérieur d'une procédure juridictionnelle ou l'existence d'une contestation par le titulaire d'une partie des sommes inscrites au décompte général » et qu’ « il ne peut en aller autrement, dans ce dernier cas, que s'il existe un lien entre les sommes réclamées par le maître d'ouvrage et celles à l'égard desquelles le titulaire a émis des réserves ».
En outre, la Cour (CAA Bordeaux, 4 décembre 2018, Département du Lot, req. n°16BX00805) relève qu’en vertu des dispositions de l’article 1269 du code de procédure civile, aucune demande en révision de compte n'est recevable, sauf si elle est présentée en vue d'un redressement en cas d'erreur, d'omission ou de présentation inexacte
Partant, elle constate, au cas présent, que le décompte général, qui a été accepté sans réserve par le titulaire et qui est devenu définitif, ne comporte aucune réfaction au titre des pénalités en cause, nonobstant le fait qu’elles aient été récapitulées par ailleurs sur l'un des feuillets établis par l'économiste de la construction.
Par conséquent, le département ne pouvait pas, eu égard le caractère intangible du décompte général et définitif, déduire ultérieurement du solde du marché, le montant qu'il estimait pouvoir retenir au titre des pénalités susvisées, dont l’absence ne peut être regardée comme constitutive d'une erreur purement matérielle ou d'une omission.
Le caractère définitif et intangible du décompte général d’un marché public fait obstacle à toute modification ultérieure.
Article en partenariat avec : Hourcabie Avocats, Cabinet d’avocats dédié au droit public des affaires et au droit de la construction publique et privée.